Le jour du foirage total en matière d’allaitement

Cette semaine, je vous publie le témoignage spontané de Léa face aux difficultés de l’allaitement.

L’allaitement … Avant d’être enceinte je n’avais jamais eu trop d’avis sur la question, je ne m’y intéressais pas vraiment en fait (comme pour beaucoup de choses) … J’ai toujours dit que ce n’était pas un truc qui me faisait ultra rêver mais que c’était quand même indéniablement ce qu’il y avait de meilleur pour un petit bébé … Ça ne me questionnait pas plus que ça … Et puis j’ai changé de point de vu ou plutôt j’ai évolué …

Au début de ma grossesse je n’y pensais pas trop puis, plus ma grossesse avançait plus l’allaitement me faisait envie, j’ai toujours dit que, je cite: « j’essayerais, si ça marche tant mieux si c’est trop galère tant pis » … (discours hyper courant avant de devenir maman …) … Mais ce n’est pas si simple que ça … En tout cas ça ne l’a pas été pour moi …

Ma petite fée née, aussitôt sortie elle se met au sein naturellement et la « tétée d’accueil » a été un bonheur immense, continuer à nourrir mon enfant, je me sentais pleinement dans mon rôle et à ma place, j’étais heureuse de ma décision, je me sentais bien, sereine et en pleine possession de ce choix, je me disais surtout que pour moi c’était une suite logique de ma grossesse, cette grossesse que j’ai tant aimé, c’était le prolongement le plus juste et ça avait l’air de fonctionner à merveille … J’allais pourtant faire face a une immense déception …

Apres les premières heures idylliques, les 39 heures de travail se font sentir plus que jamais et viennent les heures de grande fatigue, malgré elles il faut continuer de stimuler pour la montée de lait, gérer son bébé qui pleure, les tétées qui s’enchainent à une vitesse folle … Tout le monde me dit que mon bébé a une position parfaite, qu’il tête divinement bien … Tout le monde y va de son conseil et me félicite, j’ai même le droit de rentrer à la maison … Pourtant je suis épuisée, je craque, je commence à avoir mal, je sens que ça me tire, que mes alliés s’assèchent, et que malgré toute la lanoline et autre miel médical et cataplasmes de lait maternel du monde, ils finissent par craquer eux aussi … Ce qui petit à petit se fissurait en moi finissait par se fissurer sur moi … Malgré tout mon courage, ma volonté et ma détermination, j’ai stoppé la mise au sein, cette douleur lancinante et sournoise qui me faisait hurler de mal à chaque fois je ne pouvais plus la supporter car elle était insupportable, insoutenable. Se mêlait a elle le gout de la défaite et le sentiment d’échec, la peur de donner l’impression à ma fille de la rejeter, je pleurais de tout …

La poitrine engorgée, on part louer cette machine infernale, celle qui je ne le savais pas encore allait me suivre pendant 7 mois, elle sera mon troisième bras, mon sein artificiel, cet engin a été mon sauveur, il a aussi été mon cauchemar …

Première utilisation laborieuse et douloureuse … Au départ j’avais pris la décision de tout arrêter et d’utiliser ce système uniquement  pour tarir les montées de lait et la production, mais en voyant tout ce lait, je n’ai pas pu, j’ai continué, je voulais que ma fille boive mon lait, celui que je pensais être le meilleur pour elle … Pour se faire je tirais plusieurs fois dans la journée, ça allait de 4 à 8 fois par jour en période de pic de croissance, mes journées étaient rythmées par les tirages, donner les biberons, endormir ma fille, la changer, tirer, donner les biberons, endormir ma fille, la changer … J’ai eu très peu de temps pour moi pendant de longs mois, mais je m’y faisais, c’était devenu ma façon de vivre, ma routine, mais j’enviais ces mamans qui sortaient ne serait-ce que 30 minutes pendant que moi je devais tirer mon lait, ces mamans qui faisaient une sieste pendant que moi je tirais mon lait, la famille qui prenait l’apéro pendant que moi je tirais mon lait, ceux qui profitaient de dormir le matin pendant que moi je tirais mon lait … Ca a été difficile … Je n’ai jamais réessayé de remettre ma fille au sein car la douleur n’a jamais vraiment disparue, j’avais peur de trop souffrir à nouveau, physiquement j’étais vulnérable, je me sentais honteuse, psychologiquement j’étais triste et vidée …

Quand ton bébé est au biberon, tout le monde se sent alors la permission de le lui donner, j’étais devenue susceptible avec ça, je ne supportais pas voir quelqu’un nourrir ma fille autre que mon mari ou moi, tout simplement car ça aurait dû être MON moment, ça devait être MA partie, on me volait des moments que je m’étais projetés avec elle, intimes, complices …

On m’a souvent dit que ce n’était pas grave, que l’important c’était qu’elle ait le meilleur: mon lait … C’est vrai, mais pourtant ça me déchirait …

Et puis il y a toujours ces discours culpabilisants, ça viendrait de la position (pourtant parfaite au départ), ça viendrait de ma peau, ou celles qui te disent qu’elles elles ont continué malgré la douleur … Que c’est dommage !!! Ca ça te crève le cœur … Ça te fait encore plus mal … Parce qu’elles n’ont aucune idée de la douleur qu’a été la tienne … De la tristesse immense qui t’a envahi quand tu as décidé a contre cœur d’arrêter le massacre, que tu te culpabilises déjà assez toi-même, tous les jours, chaque heure et chaque minutes … Pourquoi tout le monde y arrive et toi t’as pas réussi ?! Tu te sens incomprise, seule …

Comme pour beaucoup de choses concernant la maternité tant que tu ne l’a pas vécu tu ne peux pas savoir, tu peux imaginer, mais tu ne peux pas mesurer … Cette claque, cette baffe que tu te prends en pleine gueule, celle dont tu as du mal à guérir …

Je n’ai pas été de celles pour qui l’allaitement s’est mis en place tout de suite avec facilité et sans douleurs … Je suis de celles qui ont souffert, qui ont pleuré de douleur, d’épuisement, de tristesse, de regret, mes larmes étaient celles d’un cœur qui saignait d’une deuxième séparation forcée avec mon petit bébé … Ces larmes me propulsaient violemment dans ma nouvelle réalité, celle que je pense ne pas avoir assez anticipé … Moi qui avait tant aimé ma grossesse, on avait coupé le cordon physique, et voilà qu’on me coupait un deuxième fil invisible, un fil dont j’avais encore besoin … Je crois qu’on m’avait prévenu que ce ne serait pas si facile … je pense … En fait je n’en suis plus si certaine … Je n’ai peut-être pas écouté, je ne voulais peut être pas entendre …

Aujourd’hui je suis si fière de mon parcours, fière de ce que j’ai accompli, émue de ce que j’ai fait. J’ai réussi à allaiter mon bébé exclusivement pendant 5 mois, le sixième mois a été le mois de relais pour une transition en douceur. J’ai eu si peur, peur de ne pas réussir à créer de lien avec elle face à l’échec de la mise au sein et pourtant il est bien là, en fait il ne s’est jamais brisé, il ne nous a jamais fait faux bond …

A mon mari, cet homme merveilleux; Qu’aurais-je fais sans toi? Merci. Et à mon amie Laura ce petit bout de femme qui m’a tant aidé, merci aussi!

[Auteure] : Léa , voici son blog pour lui donner un petit coup de pouce 🙂

https://mamanfeeblog.wordpress.com

23 réflexions sur « Le jour du foirage total en matière d’allaitement »

  1. Wouaah quel courage, je suis émus de lire ce jolie témoignage plein de vérité. Félicitation pour ta persévérance.
    Bonne continuation

  2. Bravo Lea pour ton courage et ta persévérance, aujourd’hui tu as ta récompense une petite étoile merveilleuse et pleine de sourires …

  3. Ton témoignage m’a mis les larmes aux yeux! Je comprends tout à fait ce que tu décrit. J’ai vécu un peu près la même chose sauf que pour moi la douleur a fini par s’estomper après quelques semaines. J’ai eu de la chance! Je continue l’allaitement mais avec la reprise du travail c’est très dur! Je tiens donc à rendre hommage à toutes ces femmes merveilleuses, comme toi, qui malgré les difficultés énormes, et dans la douleur intense, ont réussi à continuer et à avancer dans ce parcours qui n’est pas des plus faciles mais qui est tellement fort et magnifique! Bravo à toi !

    1. Merci infiniment c’est Bon de lire ca bravo à toi aussi c’est genial que tu avis réussi à continuer le sein bravo ❤️

  4. Waouh… Tu mets exactement les mots sur ce que je ressens actuellement. Je n’arrive pas à allaiter ma fille car son frein de langue m’a créer des crevasses et une peur bleue d’avoir à nouveau mal. J’essaie de tirer mon lait mais j’ai l’impression de perdre un temps considérable de sa vie et de la mienne. C’est tellement difficile de se sentir incapable alors qu’on avait tout projeté dans nos têtes. On s’en veut et on pense que c’est notre bébé qui nous en veut. Je veux sortir de ce cercle vicieux qui me fait mal à m’en tordre de douleur psychologique !
    Merci pour ce témoignage qui affirme que je ne suis pas seule à ressentir tous ces sentiments affreux envers moi même..

    1. Bonjour Samantha,
      je vous conseille de voir une consultante en lactation pour vous aider si ce n’est pas déjà fait.
      Bon courage !

    2. Ne vous sentez pas incapable, vous ne l’êtes pas et surtout vous êtes courageuse de vouloir poursuivre. Vous faites du mieux et vous y parvenez. l’allaitement n’est pas toujours facile contrairement aux idées reçues, ça peut-être une véritable épreuve de vie mais quoique vous fassiez, vous en ressortirez nouvelle et plus forte. Votre bébé ne vous en voudra pas, restez sereine et soyez indulgente avec vous-même. Bon courage Samantha

  5. Bonjour Léa,
    Cela me fait chaud au cœur de te lire car j’ai à peu près vécu la même chose que toi. J’ai du tirer mon lait car comme toi grosses crevasses, gros engorgement et une douleur insoutenable… et puis j’ai été hospitalisée, on m’a donné un traitement non compatible avec l’allaitement (j’ai du donc tirer mon lait et le jeter pendant quelques jours) et ensuite ma fille arrivait encore moins à reprendre le sein, c’était des cris, des pleurs, je n’en pouvais plus.
    Mon mari était sceptique au début, il disait que je n’avais qu’à passer au biberon (de préparation infantile) voilà tout, c’était sa façon à lui de me soutenir, même s’il était à côté de la plaque… Ensuite il a compris que c’était important pour moi, il a fini par accepter cette machine qui trônait au milieu du salon… Tout en me reprochant parfois de monopoliser le réfrigérateur, puis le congélateur (“j’ai plus de place pour les légumes !”) Bref ça n’a pas toujours été facile.
    Le plus dur c’est quand certains se permettaient de me juger car je suis une petite nature qui n’ai pas persévéré. J’ai même eu droit à un médecin qui ne voulait pas me prescrire de médicaments compatibles avec l’allaitement sous prétexte que “de toute façon, à 8 mois l’allaitement ne sert plus à rien et de toute façon pourquoi continuer quand ce n’est pas un acte NATUREL ?”
    Merci à la sage-femme de la maternité qui m’a prescrit un tire-lait medela, c’est grâce à ce tire-lait que j’ai eu la force de continuer l’allaitement. Merci à ma conseillère en lactation qui m’a dit “madame, s’il y a du plastique entre vous et votre enfant, ce n’est pas grave, ce n’est pas ça qui est important”, quel réconfort ! Et merci aux réunion de LLL où j’ai retrouvé d’autres mamans en galère, dont une qui m’a dit une fois “ah, mais c’est toi la maman la plus courageuse du monde !”, c’était gentil et cela m’a fait chaud au cœur 🙂
    J’ai eu la chance qu’avec le tire-lait la douleur s’estompe peu à peu (bien que le réglage de démarrage n’ait pas été évident et qu’apparemment j’étais colonisée par une bactérie), j’ai trouvé ma routine, dès que je me levais le matin j’avais une idée de mes horaires de tirage de lait, des horaires approximatifs des biberons et donc de mon emploi du temps. C’était une organisation bien rôdée et pas si compliquée finalement. J’étais familière des conditions de conservation et j’adaptais le stockage en fonction des prochains biberons de la journée et de la température ambiante. Je devais juste gérer les sorties en sachant que je ne devais pas être dehors plus de 4-5 heures d’affilée (sinon engorgement) ce qui revenait à faire des sorties sur des demi-journées (ce qui est déjà bien).
    J’ai repris le travail à 9 mois, j’ai continué à tirer mon lait mais j’ai du compléter avec du lait que j’avais congelé. Quand j’ai fini mon stock de congelé, j’ai du passer en mixte (vers 11 mois) et j’ai arrêté complètement à 13 mois car l’effort me semblait important pour une quantité de lait devenue dérisoire.
    Ton histoire, comme la mienne, ce ne sont pas des histoires de foirage total d’allaitement, mais des histoires de femmes qui deviennent mères et qui font comme elles peuvent, avec courage et pas forcément le soutien ni l’acceptation sociale qu’il leur faudrait.
    Je te souhaite bon courage pour la suite !

    1. Merci pour ton joli témoignage je rencontre peu de maman en tire allaitement et c’est un vrai réconfort de te lire j’ai eu la chance d’avoir des amies une famille et un mari extraordinaire qui m’ont soutenu à tous les instants Mais il y a tjs des pincements au coeur parfois dans certains articles dans certaines émissions ou sur les réseaux … Merci de m’avoir répondu Ca me touche énormément et bravo à toi Car le tire allaitement c’est tres tres dur Mais quelle fierté aussi ❤️

  6. C’est un beau témoignage, très émouvant.
    Je suis maman de 3 enfants et hélas mon premier allaitement ressemblait au votre avec les mêmes sentiments et surtout l’incompréhension de l’entourage qui comportait trop peu de femmes ayant allaité. A mon second bébé c’est ajouté la difficulté d’une césarienne, j’ai rejoint un groupe d’allaitement et tout c’est bien passé jusqu’à 8mois et demi. J’ai arrêté à cause de la fatigue occasionnée par l’activité professionnelle mais c’était une belle revanche et surtout sans jamais avoir utilisé le tire lait, cette machine que j’avais tant détesté au premier. Pour le troisième tout c’est merveilleusement bien passé encore mieux puisque la prise de poids était au dessus des espérances ce qui n’avait pas été le cas avec les deux grandes soeurs et qui a été cause de nombreuses larmes faces aux pédiatres peu compétents en matières d’allaitement. Une deuxième revanche donc. Ce 3eme bébé va avoir 7 mois, je voudrais continuer d’allaiter encore mais la reprise du travail pèse, il s’est habitué au biberon et peine à patienter pour faire monter le lait alors j’ai emprunté un tire lait manuel pour l’emmener au travail et à mon grand étonnement je ne trouve pas cela si désagréable, c’est une petite réconciliation, c’est pas souvent, sans contrainte même à la maison finalement c’est plus pratique que le tire lait électrique mais le chagrin de la rupture de ce”fil invisible” est bien là… Bon courage à toutes les mamans 😉

    1. Merci pour ta réponse qui me donne beaucoup d’espoir pour un allaitement au sein pour mes futurs petits ☺️☺️❤️❤️

  7. Bravo à toi Léa, c’était une période difficile, éprouvante, et l’entourage n’aide pas la plupart du temps. On en sort toujours beaucoup plus forte, et fière de ce qu’on a accomplie!
    J’ai eu deux longs mois difficile avec mon 1er enfant: il ouvrait très mal la bouche, mauvais positionnement, crevasses, candidose mammaire, baisse de lait…et mon entourage (sauf mon mari et une amie qui m’ont soutenu) qui me disait de “laisser tomber”, “ton lait n’est pas bon”, “tu n’as pas assez de lait”, “le biberon est meilleur et au moins tu sais ce qu’il boit” etc
    Et moi je tenais bon car faute d’avoir eu un bel accouchement, je voulais réussir à allaiter mon fils, lui donner le meilleur et créer ce lien magique, donc je pleurais, j’ai acheté toutes les crèmes, patchs, essayer tous les remèdes de grand-mère et le tire-lait bien sûr! mais ce qui m’a sauvé c’est d’avoir fait appel à une conseillère en lactation.
    Ce n’est pas rembourser pas la Sécu (quel dommage car beaucoup de mamans y aurait recours si c’était le cas!) et c’est elle qui a diagnostiquer la candidose alors que j’avais vu mon gynéco, mon médecin et trois sages-femmes. On a revu la position, tout quoi…et tout est rentré dans l’ordre, chaque jour était une petite victoire! Au final j’ai pu l’allaiter 12 mois et 8 jours, il s’est sevrer de lui-même. J’étais heureuse.

    1. Merci de votre témoignage Eve !
      Hélas oui, les médecins ou sages-femmes sont mal formées à l’allaitement dans l’ensemble. C’est une démarche souvent personnelle qui les conduit à se spécialiser dans l’allaitement comme ça a pu être le cas pour moi.

    2. J’ai consulté Valerie Mais je pense que j’avais tellement souffert que je n’osais plus mettre ma fille au sein c’était beaucoup d’appréhension … avec le recul je me dis que j’aurais dû retenter mais Bon c’est ainsi … merci pour tes mots

  8. Bravo Léa !! Vous pouvez être fière de vous !! Mon 2ème bb et mon 1er allaitement on aujourd’hui 12jours, et comme vous j’en ai bavé sévère au début ! Encore aujourd’hui j’ai une crevasse au sein gauche qui me fait souffrir. La 1ere nuit a la maison fut la plus dure….j’ai tenu mais dans les larmes et la douleur….et honnêtement j’aurais été encore à la maternité j’aurai réclamé un biberon !
    J’ai tenu parcque je n’étais et ne suis pas seule, mon wonder mari me soutient beaucoup !!!
    On est pas préparée à ça… alor je vous dis bravo, non vous n’avez pas raté qq chose ne culpabilisez pas, vous avez été au bout de ce que vous pouviez supporter et ça c’est humain !
    Belle route à votre fille et vous 🙂

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