Pourquoi l’allaitement n’est-il pas plus soutenu par l’Etat?

Nous en parlons souvent sur ce blog, l’allaitement participe à la préservation de la santé de l’enfant et de sa mère. Alors, si l’allaitement peut éviter des maladies, et donc des coûts pour la société, je me suis longtemps (et naïvement) demandé pourquoi le soutien à l’allaitement ne faisait pas partie des priorités nationales.

Combien coûte le non-allaitement?

A part quelques recommandations dans le PNNS, on ne peut pas dire qu’il existe une réelle politique de l’allaitement en France. Du coup, pour tenter de comprendre, je me suis « amusée » à regarder un peu ce que coûte le fait de ne pas respecter les préconisations de l’OMS : six mois d’allaitement exclusif, puis allaitement mixte au moins deux ans voire plus. J’ai fait ce calcul (°) sur les deux types de pathologie où l’on a le plus d’évidences en faveur de la protection par l’allaitement. Il s’agit des maladies infectieuses chez le bébé, et du cancer du sein chez la femme. Il en ressort que ces maladies, qui auraient pu être évitées par un allaitement long, coûtent à la France environ 400 millions d’euros par an. Cela donne déjà un ordre d’idées.

Alors, pourquoi l’Etat ne mène-t-il pas une campagne vite fait bien fait pour soutenir les femmes dans leur allaitement? Pour que quand elles sortent à J3 elles ne soient pas livrées à elle-mêmes avec leur montée de lait? Pour que quand elles allaitent plus de six mois elle n’aient pas leur médecin sur le dos? Mais pourquoi?

Et combien ce non-allaitement rapporte-t-il?

Eh bien j’ai calculé en parallèle combien rapporte, en TVA, un bébé non allaité : 220 euros par an sur les PPN (°°) et matériel divers.

En 2008 (°°°), les chiffres de l’allaitement montraient qu’environ 30% des mères n’allaitaient jamais et qu’à trois mois, seules 15% des mères allaitaient encore exclusivement. Ces chiffres n’ont a priori pas tellement changé, et sur une année qui voit 800 000 naissances environ, le montant de la TVA perçue par l’Etat est donc d’approximativement 125 millions d’euros. On n’est pas loin de l’ordre de grandeur des coûts. D’autant qu’à cette somme importante, il faut ajouter la TVA perçue sur les médicaments pris lors des maladies dont j’ai parlé ci-dessus, et les contributions directes perçues sur les salaires des professionnels de santé. Là, cela devient carrément difficile à calculer, mais une chose est sûre, je me trompais en pensant que le non-allaitement coûte très cher financièrement. C’est bien plus compliqué qu’il n’y semble! Et quand on sait que 50% de la recette globale de l’Etat provient de la TVA, on imagine mieux…

Par contre, ce qui est sûr, c’est que comme d’habitude, ce sont les familles qui payent. Et qui en plus ont à subir le drame de la maladie.

On aimerait tous vivre dans une société qui fait passer le bien commun et la qualité de vie de ses habitants avant tout en les encourageant sur des pratiques saines comme l’allaitement. Mais quand ce n’est pas le cas, il faut savoir ne compter que sur soi-même pour s’informer, sans relâche, et trouver les bons professionnels de santé. Heureusement, il existe une réelle solidarité dans les associations de parentage, qui font un travail formidable. Qu’elles soient ici mille fois remerciées!

(°) Je vous passe les détails de ma mini-étude, mais je reste à votre disposition pour les donner à celles qui le demanderont.

(°°) Préparations pour nourrissons

(°°°) Etude de M.J. Communal

9 réflexions sur « Pourquoi l’allaitement n’est-il pas plus soutenu par l’Etat? »

  1. Bonjour,
    Sur le fond, je suis d’accord avec vous, mais je pense que financièrement, cela reviendrait peut-être plus cher que les femmes allaitent (je suis pro allaitement, mon fils de 6 mois est encore allaité), mais soyons réalistes : on ne peut pas reprendre le travail à 2 mois et demi et continuer un allaitement exclusif. Il y en a pour qui ça se passe bien, mais c’est tellement compliqué ! Dans les pays où les femmes allaitent exclusivement au moins 6 mois, elles ne reprennent pas le travail à 2 mois et demi… C’est ça qui couterait cher à la sécu, un congé maternité plus long.
    En ce qui concerne les maladies, mon fils est allaité en quasi exclusif et a déjà eu 2 bronchiolites, plusieurs rhino… Donc, je me vois bien dire à mon employeur “laissez-moi allaiter, mon bébé sera moins malade et vous me verrez moins souvent absente”…
    Donc oui, l’enjeu est financier, mais dans le sens inverse, je pense.

    1. Bonjour Gabrielle,
      Effectivement, l’idéal serait d’avoir un congé de maternité plus long pour faciliter l’allaitement exclusif jusqu’à six mois. Et,oui, les enfants allaités peuvent être aussi malades, l’allaitement ne fait que diminuer le risque.
      Mais,malgré tout,les études montrent que l’absence d’allaitement coûterait bien plus cher.L’économie ne concernerait pas que les maladies infantiles mais aussi celles de la mère ( cancer, ostéoporose,…) ainsi que la diminution du risque de certains maladies à l’age adulte( diabète , maladies cardio-vasculaires,…) de ces enfants allaités.

      1. Oui, je veux bien y croire, l’obésité aussi.
        Mais bon, quand on voit les nouvelles lois santé qu’ils nous pondent, on peut toujours rêver pour que l’allaitement soit une “priorité” de nos dirigeants 🙁
        Personnellement, je suis infirmière, et quand je vois simplement comment je suis perçue (dans mon allaitement) par mes collègues qui sont sensées être des personnes ayant de l’empathie, étant à l’écoute et un minimum sensibilisée à ça, bah…. je me dis qu’il y a du chemin à faire….. Je me demande même si les personnes qui ne sont pas dans le domaine ne sont pas plus ouvertes à l’allaitement… ! sur 8h de travail, je peux tirer mon lait 1 fois, et encore, quand je peux !

    2. Je complète en précisant que c’est dommage de dire “on ne peut pas reprendre le travail et deux mois et demi et continuer un allaitement exclusif”. il est vrai que dans certaines situations c’est compliqué, mais il me semble que ce n’est pas la majorité des cas. Avec un minimum d’organisation et de soutien, nombreuses sont les femmes qui réalisent cet allaitement exclusif en travaillant.
      C’est important de passer le message, pour qu’au moins celles qui en ont envie essayent, quitte à arreter si ça ne marche pas.
      Mais qu’elles ne partent pas vaincues d’avance.
      J’ai allaité mes deux enfants exclusivement 6 mois en travaillant à temps plein, avec notamment un des postes qui était en extérieur avec pas mal de déplacements. ce n’était pas de tout repos, mais à aucun moment je n’ai eu envie d’arreter. et je connais plein de femmes pretes à faire ce meme témoignage :))

  2. Je travaille et mon fils de 6 mois est encore allaité, j’ai repris il avait 3 mois. Et je n’ai pas dit que c’était impossible, mais bien que c’est difficile. Personnellement je n’ai jamais les mêmes horaires, un coup de 6 à 15h, le lendemain de 12 à 21h, donc pour la lactation, c’est quand même compliqué. Quand c’est irrégulier, la lactation ne suit pas toujours. D’autant quand on ne peut tirer son lait au travail. Donc, désolée, mais en Suède, elles allaitent toutes, mais elles ne reprennent pas le boulot quand bébé a 2 mois et demi.
    A 14h (ayant pris à 6h), la plupart du temps, je n’ai pas encore mangé, ni pu faire pipi, alors tirer mon lait……

  3. Et je reviens sur “nombreuses sont les femmes qui réalisent cet allaitement exclusif en travaillant” : hmpf ? Moins d’une femme sur 4 continue au dela de 3-4 mois.

    1. C’est déjà pas mal! beaucoup plus qu’il y a une quinzaine d’années en tout cas. Or l’opinion publique majoritaire est de penser que c’est totalement marginal.

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